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LE TÊTARD de Jacques Lanzmann Empty LE TÊTARD de Jacques Lanzmann

Sam 11 Fév 2012 - 12:57
LE TÊTARD de Jacques Lanzmann 97822613


Résumé

"Je ne veux pas mourir sans avoir fait l'amour et la Résistance" : voilà ce qui obsède le jeune Jacques au moment où la Seconde Guerre mondiale éclate.
Tandis que son frère aîné et son père s'enrôlent dans les maquis communistes, l'adolescent se débat entre un passé douloureux, un présent décevant et un futur incertain. Lui, le petit juif, "le rouquin" veut sa part de bonheur... Dans ce texte, Jacques Lanzmann redevient l'enfant qu'il fut, le Jacquiot, le domestique de ferme, loué, éloigné des siens... s'il ne cache pas les multiples raisons de ses souffrances, il n'en tire aucune gloire particulière; au contraire, tout au long de ce récit picaresque, le narrateur trouve en lui le moyen de marquer ses péripéties du sceau de l'énergie vitale.


261 pages
10 mai 2007
18 €
EDITIONS DU ROCHER
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Jennifer3121990
Plume de velours
Plume de velours
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LE TÊTARD de Jacques Lanzmann Empty Re: LE TÊTARD de Jacques Lanzmann

Sam 11 Fév 2012 - 19:11
Merci d'avoir créé cette fiche !

Mon avis :

Envie d'en savoir plus?...
Je l'espère bien ^^ ! Voici mon avis =)

C'est un avis un peu brouillon que je vais vous donner, car je ne trouve pas cela évident de disserter sur un bouquin =) Pas envie de me coltiner l'intro, les trois ou plus paragraphes bien complexes et la conclusion, summum d'intelligence. Na, na, na! Je vais simplement : écrire.

Ecrire. C'est ce qu'à fait l'auteur, Jacques Lanzmann. Un homme, décédé aujourd'hui, qui fut un vrai gosse, comme nous tous. Je vous invite à le découvrir.

Un vrai gosse donc, mais avec une enfance peu commune, bien à lui et bien écrite. Car c'est cette enfance - SON enfance - qui est racontée au travers de ce livre - que je n'ose qualifier de roman, car il s'agit d'une autobiographie - mais que je n'ose qualifier d'autobiographie, car même si l'auteur lui même l'affirme, on ne le trouve pas vraiment dans les rayons du genre -.

Petite histoire de mon exemplaire : je l'ai déniché par pur hasard, lors d'une petite promenade solitaire au travers d'une brocante de campagne. Sous un soleil de plomb, les pieds en coton, je m'agenouillais pour farfouiller et dénicher de bons petits romans - du moins je l'espère à chaque fois, car je ne peux les lire sur place ! - , que je négociais ensuite à des prix déraisonnables : pensez donc, quelques centimes pour un livre! N'ayant pas les moyens de les acheter neufs et la fin justifiant le moyen : je marchandais encore et toujours !

Ce livre donc, m'a tout de suite attiré. La quatrième de couverture, il faut le dire, a un certain style assez charmeur. Passionnée de tout ce qui touche les Grandes Guerres, les mots "Occupation" et "Résistance" ont achevé de me convaincre : il a fini dans mon sac. Puis dans ma bibliothèque, plusieurs mois. Enfin, je l'ai saisi et dévoré. Dé-vo-ré.

Pourquoi?...Ah. La fameuse question.

C'est l'histoire d'un p'tit gars d'environ 6/7 ans au début du livre, d'environ 14/15 ans aux dernières pages. Cette histoire, c'est le p'tit gars lui-même qui l'a raconte : l'auteur, Jacques Lanzmann. Sauf que lorsque ce dernier écrit le livre, en 1976 - date, d'ailleurs, à laquelle fut publiée mon exemplaire! Il s'agit donc d'un des premiers tirages - il a 49 ans ! Je lui rend hommage : il ne laisse jamais transparaître son âge réel, son âge d'adulte, au travers de ses mots. J'ai été transporté par un univers décrit avec la facilité - mais également les pensées complexes et parfois bien étranges - d'un gamin. Sans tricheries, sans niaiseries. Que des bonnes choses.

Pas de fantastique, pas de dragon ou de sorcière. A moins que la grand-mère ne soit, bien sûr, assimilée à une sorcière! On découvre page après page l'enfance de l'auteur, une enfance à la fois très noire, très tragique, mais également drôle et envoûtante.
"Moi, je m'étais toujours senti plus français que juif, mais aussi bien plus rouquin que français et juif. J'étais un rouquin-français-juif de parents divorcés-citadins transplanté-analphabète-et-paysan; un vrai poil de carotte sans vraie famille, mais avec des familiers."
Tout est dans cette citation. Mais comme ce ne sont que les premières phrases des 219 pages, on ne s'en rend réellement compte qu'à la fin du livre.

Jacques - ou Jacquot- est roux. Il est également juif. Malheureusement, la Seconde Guerre Mondiale se fait de plus en plus présente; il est inutile de vous en rappeler les conséquences pour les Juifs de notre nation. Et pourtant...pourtant on hésite toujours entre deux pages : quel est le plus grave problème pour ce gosse : être roux ou être juif? Non pas qu'il s'en plaigne : ce sont les réactions des gens qui l'entourent qui vont être excessives, selon l'un ou selon l'autre de ses caractéristiques.

« Que s’était-il donc passé entre Marraine et moi pour que nos rapports fussent aussi mauvais ? J’y ai, bien sûr, souvent pensé depuis, et combien de fois n’ai-je pas entendu ou lu des histoires navrantes de gosses brimés, martyrisés par des marâtres. Il n’y a pas d’explication logique de la haine entre une belle-mère et son beau-fils, il y a des caractères qui s’affrontent, des physiques qui ne vont pas ensemble, et l’expression souvent employée « Entre eux, c’est une question de peau », résume le problème. […] Il y a des visages de gosses qui appellent les coups, cela dépend de l’angle où l’on se trouve. Vus autrement, ces mêmes visages appellent l’amour. Je crois qu’Hélène m’a toujours regardé du mauvais côté. »

Rejeté par ses parents, ce gamin va connaître différentes expériences...que je ne vous décrirai pas. Je ne veux pas gâcher le plaisir! Je peux toutefois citer quelques passages, que j'ai saisis lors ma lecture.

« Autour de moi, vingt-huit vaches et quatre paires de bœufs. Les vaches c’était pour le lait, les bœufs pour le travail, mais en période de labour, on attelait aussi les vaches. J’avais appris assez rapidement à les reconnaître. Entre cent mille bêtes, j’aurai reconnu les miennes. Lorsque l’on vit avec des vaches, que l’on ne peut ni lire, ni écrire, ni aller au ciné, au musée ou au restaurant, quand on n’a rien d’autre à faire que de les garder, on les regarde, et quand on les a vues jours après nuits et comme ça pendant des mois et sous toutes les lumières, et dans toutes les prairies, on finit forcément par reconnaître sa vache. Elle est votre amie, votre pays, votre univers, votre culture. J’étais leur vacher, elles aimaient ma présence et, je crois, mon odeur. »

« Nous avions fait halte pour la nuit dans un de ces burons où l’on recueille le lait qui sert à la fabrication du fromage de Cantal. On s’était couchés tous les deux l’un contre l’autre, à même la paille, pour se réchauffer, et l’on avait fait allonger les chiens sur nous comme des manteaux vivants. Par le toit à demi écroulé de la cabane, on voyait le ciel étoilé. Il m’avait enseigné la Grande Ourse, montré le Chariot, rempli mes yeux de Voie Lactée. Il disait, le René, que quelque part là-haut, chacun d’entre nous a son étoile et que nous sommes responsables d’elle. Il disait, le René, que de notre existence dépendait sa durée, son intensité. Il disait que certains hommes irresponsables faisaient filer leur étoile et que l’âme de ces hommes filait en même temps qu’elle. Je ne savais pas au juste ce qu’était une âme, à coup sûr ça devait être quelque chose de rare, de beau, d’aussi brillant qu’une étoile. Je demande au René ce que devient un homme sans âme. Sans hésiter, il me répond : « Un malheureux ! ».

Au fil des pages, on découvre également un gosse normal : attiré par les filles - femmes -, ne sachant comment répondre aux questions existentielles qui le hantent, découvrant la masturbation, la frustration, les déceptions, la peur - notamment au travers de la pédérastie et de la zoophilie -, les techniques sexuelles des adultes - rien de hard, je vous rassure ^^ c'est un gosse qui nous raconte les faits, avec ses yeux de gosse - , l'amour, la vie, la mort et la religion.
Au fil des pages, on voit grandir ce gamin. On le voit, bouleversé par la vie, musclé par son enfance malheureuse - mais pas totalement désastreuse au final -, devenir un homme à seulement treize ans.

« Non, je ne savais vraiment pas qui j’étais, et encore moins où j’en étais. Je parlais patois, un dialecte qui va au plus pressé. J’avais les mains calleuses, énormes battoirs pleins de verrues, les pieds déformés par le bois des sabots, monstrueux panards plantés de cors et d’œils-de-perdrix. J’avais des muscles à revendre, un sexe tout irrité parce que trop tripoté et des yeux presque bêtes à force de regarder dans le vide des autres. »

Tout ça, sur un fond de Seconde Guerre Mondiale, qui devient de plus en plus présente et oppressante, bouleversant - à nouveau - l'enfance de ce petit garçon déjà si homme.

« Il disait, l’abbé, qu’à Dunkerque « les Français avaient offert leur poitrine et les Anglais leurs machines », et moi, maintenant, j’étais là avec ma poitrine française et ma machine anglaise à vouloir casser du Boche comme grand-père Léon quand il était à Verdun sous les ordres du Maréchal. Peut-être que je n’arrivais pas à suivre l’histoire parce que je ne connaissais pas mon histoire. J’avais caché ma race, mon seul trésor, durant toutes ces années chez des fermiers et j’avais grandi en compagnie du mensonge. C’est le mensonge qui m’avait musclé, déformé les pieds, les mains et l’esprit. Le mensonge, il avait fait de moi un gosse perdu, dépouillé de toute vérité, et maintenant, dans ce camion, entre tous ces gaullistes et ce frérot communiste, je me sentais proprement dépiauté, comme les lapins de mon grand-père. Je me disais, en les entendant discuter de la liberté, qu’il me fallait à tout prix remonter la pente, reprendre du poil de la bête, réapprendre à lire et à écrire. Oui, en écoutant mon frère parler, je me disais que pour retourner les hommes il vaut mieux savoir tenir une conversation que la charrue. »

« On n’était pas davantage malheureux dans le wagon que dans la cave. C’était même plus propre, au début du moins et quand on roulait, on respirait de l’air frais. Seulement, il nous arrivait de rester des heures entières à l’arrêt en pleine campagne par suite d’un sabotage de la voie ferrée et là, on était tellement malheureux d’être enfermés qu’on râlait contre les résistants. C’était peut-être papa ou Claude qui avait saboté la voie, mais nous, on crevait dans la chaleur et dans les mauvaises odeurs. Au début, tout le monde s’était retenu, et puis quelqu’un avait commencé, alors tout le monde s’était mis à se soulager. C’est à cause de la mauvaise odeur qu’on a décidé, Bisson et moi, de s’évader à la première occasion. Mais, les occasions, il n’y en avait pas. Quand le sabotage nécessitait une trop longue réparation, les Allemands entrouvraient parfois les portes du wagon, alors on voyait la campagne et je m’imaginais tout nu avec Sarah dans une de ces petites fermes à toit rouge en train de manger des pâtes très chaudes. »

On se laisse surprendre par la guerre, qu'on croyait plus éloignée. On se laisse surprendre par ce gamin, malheureux mais débrouillard, qui va se battre jusqu'au bout, non pas pour sa patrie ou pour son honneur, mais parce que pour lui "c'était pas juste de mourir sans avoir fait l'amour" - avant dernière page du livre -.

Ma note :

5/5
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